ECHO DE CH’NORD ECHO DE CH’NORD
Printemps 2005
Poézine gratuit et aléatoire
Les auteurs sont seuls responsables de leurs écrits
N°31 printemps 2005
Yvette Vasseur. 9, rue de la Gaieté 59420 Mouvaux e-mail : yvettevasseur@wanadoo.fr
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Attention au « Craou » ! *
Comment savoir dans quelle mesure
Et dans quelles proportions durables changeront les choses ?
Le printemps ?
Que ce soit celui de la nature ou que ce soit celui des cœurs et des amours
A replanter, à rempoter, à tailler pour la pousse et aérer ;
Comment être sure de quoi que ce soit ?
Ici les oiseaux,
Ceux venus de la mer comme les mouettes,
Ceux qui ont toujours été là comme les pigeons,
Moineaux et étourneaux,
Font des balais, envahissent le ciel entre les tours
Le matin après les tempêtes de vent
Ou après la neige tombée à l’aube.
Benjamin descend et nous rappelle sur l’interphone
Pour nous dire de faire attention si l’on sort,
La neige glisse
Et à cette heure nous n’avons pas encore ouvert les tentures.
Nous restons là, en pyjama, les cheveux en bataille,
« Le Craou » sur les bras :
Tout semble tourner autour de lui,
De change en change, de biberon en biberon,
Son sourire nous rassure, ses menottes marquent la cadence,
Donnent du rythme à la vie,
Son visage, rond et rigolard, fait naître la bonne humeur.
Il s’en va, galopant à quatre pattes dans l’appartement,
Nous suivant ou nous précédant
Et son babil déclanche nos rires et nos marques d’affection.
Au-delà des intempéries des orages de nos vies
Qui flouent et nous désespèrent,
Il est le point de ralliement d’une conscience collective,
Le point d’orgue de notre cohésion familiale
Le soleil de ce printemps à venir !
Yvette Vasseur
- « Craou » est le surnom de mon petit-fils Matteo
Hommage à Georges Piou
Georges est décédé le 27 février 2005 au soir, entouré de sa Famille, c’était dimanche,
Il souffrait d’une longue maladie qui lui a volé la vue et l’ouie et la possibilité de se nourrir normalement. Il avait 85 ans,
Je le connais depuis 1990, je l’ai rencontré chez lui en juillet 91. je garde de lui et d’Alberte, son épouse, un souvenir ému et plein d’enseignement sur la joie de vivre, la franchise et sur le désir d’éternelle jeunesse d’un homme qui eu 8 enfants et beaucoup de petits enfants.
Il fut un homme engagé, véritable Don quichotte des temps modernes, tant par sa revue de poésie « Poétic7 » qu’il a tenu de nombreuses années, que par son appartenance au mouvement libertaire et pacifiste de sa région.
Et je souhaite à tout homme de pouvoir dire, à son heure dernière, avoir eu une vie aussi bien remplie.
Juillet 1991
Dans la maison de Georges, un petit chien blanc vous tourne autour et jappe pour vous accueillir tandis que le chat prend la pose, impassible, cent yeux de chats vous scrutent dans l’immobilité de leur posture.
La vie coule doucement au milieu de cette présence et de celle des livres, des tableaux, des sculptures qui envahissent la maison.
Les jours d’été, sous la véranda, on entend crépiter la machine à écrire. Edith Piaf ou Pavarotti tournent sur le pick-up
Les enfants, les petits enfants, sont toujours présents ...Le téléphone est partout.
Le week-end les ramène les uns après les autres, la maison se remplit des petits cousins qui jouent ensemble au baby-foot ou dans les herbes du jardinet.
Alberte prépare des pizzas ou des tartes aux oignons, écrit les adresses du nombreux courrier et tricote sous l’auvent de la cour…
On parle d’un fils à Lorient, d’amis au Sable d’Olognes…
Georges est un fou amoureux de la vie,
sa porte est toujours ouverte aux poètes et aux « fêlés » de toutes sortes !
Yvette Vasseur
Hommage de Marie Andrée Balbastre
Quand nous avons quitté Nantes en 2003, il était en bonne forme, il participait aux réunions poétiques que j’organisais avec son nœud papillon, et déclamait avec humour des poèmes de paix ou d’amour… on peut dire qu’il est resté valide presque jusqu’au bout, son visage n’avait pas changé : toujours le sourire ! Nous ne pourrons pas l’oublier en ces temps ou tellement de gens sont moroses…
Merci Georges pour ta bonne humeur, ton analyse si juste de la société, et ce combat mené toute une vie contre la guerre, l’oppression, la misère…auquel adhéraient les lecteurs et les poètes de Poétic 7.
Berceuse pour Nathalie
La tendresse est lovée au creux de ce berceau.
Bientôt tu comprendras sous ton front innocent
Qu’il suffit d’un sourire pour désarmais les sots.
Tu verras s’amasser la poussière du temps.
Laisse à dieu seul le soin de juger les hommes…
Les Judas obstinés ont-ils jamais compris
Comme il est doux d’aimer et qu’il faut faire la somme
D’un peu de charité face à la Tyrannie !
Ne sois lasse, pourtant, de croire et d’espérer
Ce monde m’apparaît, à travers un regard,
Fragile, infiniment, parmi l’ombre du soir.
Emplis ton jeune cœur d’une large bonté
Mille feux rougeoieront, demain sur la vallée…
Gérard Mozer
La lumière de la neige
Illuminait ton visage
D’une douceur de nuit
Tu marchais à pas blancs dans la ville
Le grain du silence
Avait l’éclat du sommeil
Et le ciel si proche
Qu’il suffisait de tendre le bras
De renverser ton visage
Lèvres avides d’étoiles
Pour l’embrasser
Tu marchais à mots nus
Sur des pages d’avenir
Force et paix sous le saule
Et les sapins s’ébrouant de neige
Une très douce vie
Palpitait dans ce rire en flocons
Béatrice Gaudy
« Les semailles de l’aube »
Quelles images,
Quand la mémoire ausculte
Les premiers coups du cœur ?
Un bébé s’éveille, plein ciel
Dans un repli de dune
Que bercent chênes-lièges, mimosas.
Mes tendres joues d’enfants
Livrées à ce grand-oncle
Moustache perçante comme poinçons,
Pommettes tranchantes tels des rasoirs.
L’innocence intriguée
Par les attributs de gens en uniforme :
Personnages cousus de gros fil
Hoquetant comme sur films
Burlesques noirs, blancs,
Le tambour du garde champêtre roulant
Dans la sacoche du facteur.
Jacques Canut
« Maison de Je »
Quels chefs-d’œuvre pour ce monde
Désorienté du beau ?
Accuser la fatalité, autrui
Ou soi-même ?
Ecouterai-je un chant
Qui mène à la Mort ?
Pose-t-il les bonnes questions ?
Accordez- lui la confiance de le croire
Le poète traite avec l’éternité.
On le laisse vieillir sur sa montagne.
Jacques Canut
« Tri »
Un coin de ciel
De mon logis (porte de droite),
J’ai bien du mal d’apercevoir,
En haut d’une cour trop étroite,
Un coin de ciel, comme un mouchoir.
Tel un soleil qui perd la tête
A danser sur l’ombre du toit,
J’ai voulu faire la conquête
D’un coin de ciel trop loin pour moi.
Interrogeant les lois astrales,
J’ai jeté des « pourquoi ? comment ? »
A la face pure et brutale
D’un coin d ciel indifférent.
Pas de réponse à mes alarmes.
Un beau jour je finirai bien
Par insulter, à bout de larmes,
Un coin de ciel…qui n’y peut rien.
Marie-France Cunin
« A cloche-Cœur »
ELAN
Je connais un homme
Habillé de silence.
Comment le faire parler ?
Tu vas le dévêtir, l’aimer, le décrYpter.
C’est ta peau sur la mienne
Qui pourra dessiner
Une ode araméenne
Sur nos grands draps froissés
.
Monique Coudert
« la petite fille et le sculpteur »
Nous pourrions être autres,
A jamais séparés
De ce qui sans cesse
Nous déchire
Et nous coud dans sa trame mauvaise.
Dès lors, le silence – sa foudre qui divise
Ce que les origines avaient déjà scindé –
Est un bien, une possible solution.
L’unité de l’arbre
- des racines à la cime en un seul souffle –
en est un autre.
Je les préfère à la tombe définitive,
aux dates par paires,
au petit trait d’union obscène
Qui joint sous la pluie fine
La naissance et la mort.
Jean luc Aribaud
« Une brûlure sur la joue »
A ma Mère
Entrer dans ton silence
Pour y chercher ma mémoire
Ce poids sur la balance
Où se pèse notre histoire
Entrer dans ton silence
Avec humilité sans gloire
Penser ce qui fut notre chance
Et y puiser mon espoir
Te parler d’une victoire
Sur le temps et la solitude
Te parler de mon histoire
Petites joies et habitudes
Te parler de mon espoir
Rond et criard de certitudes
Yvette Vasseur
Anthologie « Passeur de mémoire »